La Chine à 20 jours d’expédition : Test réussi du 1er « train block » Decathlon

December 22, 2017 Veronique Seel

Le train, 80% moins cher que le transport aérien, divise par deux le temps d’acheminement des marchandises depuis la Chine par rapport à la voie maritime tout en réduisant les émissions de CO2. L’innovation logistique du “train block” permet d’optimiser encore les temps de trajets, en passant de 26 à 20 jours.

 

La stratégie de développement chinoise, la “Route de la soie du XXIe siècle”, s’appuie sur un ensemble de liaisons sécurisées ferroviaires, routières et maritimes reliant la Chine à l’Europe (La Chine, par exemple, possède en Europe la concession du port du Pirée jusqu’en 2052). D’après l’agence de presse nationale Xinhua, le transport ferroviaire représente  « une partie importante » de cette nouvelle route de la soie. En effet, alors qu’il faut environ 40 jours par bateau, le transport des marchandises par chemin de fer depuis la Chine se fait en 26 jours en train partagé. Une large offre de fret ferroviaire entre Extrême-Orient et Europe va encore se développer. La Commission nationale du développement de la réforme (CNDR) a prévu une capacité annuelle de 5000 trains d’ici 2020. L’Allemagne, la France, l’Espagne et la Grande-Bretagne constituent les destinations privilégiées.

 

L’innovation logistique du “train block” devrait augmenter l’attractivité des fournisseurs chinois.

Le “train block”, ou train complet est une révolution logistique. Sa particularité consiste à contenir la même marchandise au départ et à l’arrivée, dans des conteneurs. Il évite des ruptures de charges et facilite le double transbordement dû à la voie large de la ligne ferroviaire dans l’ex-espace soviétique. Associée à son arrivée sur une plateforme multimodale, cette innovation fait gagner du temps en disponibilité produits magasins (trois à quatre jours selon Decathlon). Ce type de train se gère exactement comme le bateau. On achète départ usine des conteneurs vides, remplis par le fournisseur chinois. L’acheminement demande les mêmes documents de transport à l’export pour la douane chinoise jusqu’au dédouanement en Europe.

Decathlon, arrivée sans encombre et dans le timing escompté de son premier “train block” depuis la Chine. Crédit photo : Decathlon et Agence Home

 

Coup sur coup, deux trains complets ont gagné en fin novembre 2017 depuis Wuhan (province du Hubei) la plate-forme Delta 3 de Dourges (Hauts-de-France). Ils ont parcouru près de 11 000 km, à travers Chine, Kazakhstan, Russie, Biélorussie, Pologne, Allemagne et France. Le premier pour Décathlon, le second pour PSA. Ces premiers trains ont servi de tests avant un déploiement en 2018.

Le premier train block du géant français de la distribution d’articles de sport était composé de 41 conteneurs remplis de 630 000 articles de sport du groupe (principalement textiles et chaussures).

 

Test réussi ! Decathlon ambitionne une liaison hebdomadaire Chine / Dourges courant 2019

Ce nouveau système d’affrètement de marchandises, plus rapide que le transport maritime et plus écologique que l’avion, va accélérer la disponibilité des articles mais aussi économiser 36% d’émissions de CO2 de l’enseigne par rapport au maritime et à la route. Le transport ferroviaire réduit l’empreinte environnementale dûe au transport des marchandises, et Decathlon devrait augmenter son volume annuel de fret de 300 %. Un convoi par mois est prévu à partir de 2018 et une liaison hebdomadaire courant 2019, en partage avec d’autres acteurs à l’import comme à l’export.

 

Train block, Castorama France s’y est mis aussi ! 75% des émissions GES de l’enseigne proviennent du transport des marchandises. Castorama travaille depuis longtemps sur la question. Un tiers des marchandises arrive par péniche ou train dans les entrepôts. 50 % des flux mer-air sont en passe d’être basculés sur le rail, sur cette liaison. Le transport par train depuis la Chine a d’abord été expérimenté sur des produits promotionnels ou en “plan B”, dans le cas de défaillance d’un fournisseur chinois. Convaincus par la fluidité et la rapidité d’acheminement, Castorama a, depuis, développé la ligne ferroviaire en train complet à raison de dix à quinze fois par an pour des opérations récurrentes spéciales.

 

Demain La Chine à 12 jours d’expédition ?

 

La durée de transport (40 jours) qui pouvait parfois être un frein à l’encontre de fournisseurs basés en Chine est en train de tomber.

Les 9 000 km allant de la Chine à l’Union européenne sont parcourus en 10 jours, malgré le changement de lignes sur la Russie. Il faut autant de temps pour le parcours terminal d’environ 1 600 km dans l’Union européenne. Le délai d’expédition devrait donc encore baisser dans les prochaines années. De plus, si à ce jour, les coûts sont supérieurs au maritime, au fur et à mesure de la montée en exploitation de cette ligne, les coûts baisseront sensiblement.

 

Decathlon, l’exemple d’une entreprise française largement implantée en Chine

Cette rail’volution peut enfin être vue comme un symbole de l’importance du lien de l’entreprise avec la Chine, sollicitant à la fois ses équipes en Chine et en France. Présent depuis 2003 dans ce pays en passe de devenir la première économie mondiale, Decathlon y comptera bientôt plus de magasins qu’en France (243 magasins à ce jour, 301 en France). Avec 50 ouvertures par an en Chine, le seuil devrait bientôt être franchi.

La Chine représente aussi son premier bassin de production en Asie (devant le Vietnam, le Bangladesh et l’Inde) avec 4 usines en propre, environ 500 fournisseurs et 4 parcs logistiques.  Les conditions de travail évoluent en Chine. Franchissant  le «tournant de Lewis», les salaires augmentent et les conditions de travail s’améliorent. Dans beaucoup de secteurs, les entreprises chinoises sont en conformité avec le respect élémentaire des conditions de travail (extincteurs, propreté locaux, etc.). Les préoccupations se portent alors sur des risques et opportunités RSE plus complexes, comme la discrimination et le harcèlement, le dialogue social ou les horaires de travail décents, la conformité n’est plus l’objectif. Il sera intéressant d’observer comment le suivi des enjeux environnementaux et sociaux des partenaires chinois sera piloté demain par de grandes entreprises françaises comme Decathlon.

 

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A propos de l'auteur

Veronique Seel

Véronique Seel has been creating French content (data/studies/analysis and interviews) for EcoVadis since 2017. A graduate of the Conservatoire National des Arts et Métiers (Paris) in Engineering and B2B Marketing, Véronique progressively specialized in CSR and sustainability during her time as consultant for Vigeo Eiris, then helped BNP Paribas Cardif to create a Sustainable Development department, followed by three years contributing to cleantech and mobility projects in the European Atlantic Area. Véronique Seel is a partner of the Coapi cooperative based in La Rochelle, France.

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