Cet article a été écrit par Farid Baddache et publié sous le titre “Les défis d’une décarbonation juste à suivre en 2024” ACHATS RESPONSABLES,CHANGEMENT CLIMATIQUE,CONSEIL D'ADMINISTRATION,RESPONSABILITÉ SOCIÉTALE ET ENVIRONNEMENTALE (RSE),TRANSITION ÉNERGÉTIQUE.
Différentes évolutions réglementaires ont jalonné l’année 2023 pour accélérer la décarbonation et mieux prendre en compte les considérations sociales afférentes et intrinsèquement associées aux conditions de réussite. Des thématiques comme la biodiversité et les déchets plastiques ont gagné en visibilité.
>>> Revue en 3 points des principaux défis à suivre en 2024 concernant les entreprises autant que les investisseurs – qu’ils soient basés dans l’Union Européenne ou fassent du commerce avec l’Union Européenne.
Au début de l’année 2024, l’Union européenne (UE) a tout particulièrement marqué des avancées significatives dans le domaine de la transition écologique. Plusieurs sujets clés ont été abordés, allant de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) à la régulation des agences de notation extrafinancières. Ces initiatives visent à créer un cadre solide pour guider les entreprises vers des pratiques plus durables et responsables.
La CSRD entre en vigueur
Le 1er janvier 2024 a été marqué par l’entrée en vigueur de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), un instrument majeur pour renforcer les obligations des entreprises en matière de responsabilité sociale. Cette directive souligne l’importance croissante accordée à la durabilité dans les pratiques commerciales. Elle encourage les entreprises à adopter des approches plus responsables sur les plans environnemental et social, signalant ainsi un changement de paradigme dans le monde des affaires – à l’instar de démontrer sa capacité à garantir un salaire décent à ses salariés et ses sous-traitants.
Les évolutions de la SFRD à suivre de près
Parallèlement, des discussions ont eu lieu concernant les labels visant à clarifier la SFRD (Sustainable Finance Reporting Directive) aux articles 6, 8 et 9. Ces labels, conçus pour guider les investisseurs vers des choix plus durables, constituent un pas de plus vers la transparence et l’alignement sur des pratiques respectueuses de l’environnement. Les résultats de la consultation achevée fin 2023 donneront des orientations qui seront rendues publiques dans le premier trimestre 2024.
Prêts pour la CSDDD ?
Egalement, le renforcement de règlementations en matière de normes sociales et environnementales dans les supply chains devient une pratique courante. Plus d’une douzaine de pays imposent des réglementations dans le monde.
L’arrivée de la Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CSDDD) exige de la part des entreprises, comme des investisseurs, in fine, 3 choses :
- Conduire une revue des risques portés par l’entreprise ou l’investisseur en matière de droits humains de la part de ses activités ou actifs vis-à vis de la société. Les textes sont très clairs : il convient de renforcer désormais cette analyse avec un prisme tenant compte également des implications sociales générées par leurs risques en matière d’environnement. Par exemple, en quoi la génération de déchets plastiques, ou l’insuffisance d’efforts climatiques viennent violer des droits humains au même titre que des questions de travail des enfants ou de travail forcé.
- Organiser un plan d’action expliquant la compréhension et les mesures prises. Il convient d’engager et s’efforcer de faire évoluer les pratiques de parties prenantes partageant responsabilité dans la réduction de risques.
- Démontrer la pertinence des mesures mises en oeuvre. Il s’agit in fine de sortir d’une logique rendant compte de moyens mis en oeuvre pour partager de l’information rendant compte de résultats obtenus.
Ces questions agitent l’ensemble de notre communauté de clients partout dans le monde. Dans l’Union Européenne évidemment. Mais l’immense majorité de nos clients et autres entreprises basées tout particulièrement aux Etats-Unis, au Canada, en Afrique, au Moyen Orient, en Asie Pacifique ou en Amérique Latine a bien compris que leur capacité à continuer à faire du commerce ou lever de la dette impliquant des partenaires européens impose d’étudier sérieusement ces questions.
La fiabilité et la propriété de la donnée ESG qui devient un bien réglementaire complexe à générer
Un débat sur la pertinence de l’ESG qui invite à la rigueur dans un contexte où l’IA renforce les opportunités autant que l’opacité sur la donnée ESG
Le débat américain sur la pertinence de l’ESG est inutile et vicié sur le fond. Il est largement démontré que l’ESG apporte une information plus holistique de la valorisation des actifs – sans que cela n’impose un choix à l’investisseur qui reste maître de sa décision à préférer par exemple d’acquérir une passoire énergétique à un bâtiment à haute valeur environnementale. Pour autant, se débat sur l’ESG est très intéressant sur la forme : il impose toujours plus de rigueur dans le choix, la génération et la fiabilisation d’une donnée ESG. Ceci dans un contexte où elle devient paradoxalement à la fois un sujet de conformité réglementaire, tout en se reposant toujours plus sur de l’intelligence artificielle rendant sa confection opaque et son objet complexe juridiquement.
L’EUGBS vient renforcer la crédibilité des green bonds
Une autre avancée notable est l’initiative de l’UE visant à booster la crédibilité des green bonds par le biais de l’EU Green Bond Standard (EUGBS). Actuellement, 85% des fonds alloués aux green bonds sont alignés sur la taxonomie européenne, indiquant une adhésion croissante aux normes établies par l’UE. Cependant, cela pose également des défis, notamment en termes de besoins de financement pour la transition verte.
Les agences de notation ESG sous pression
La régulation des agences de notation extrafinancières portée par l’UE a également été mise en avant, avec l’objectif de fournir des notations distinctes pour les aspects Environnementaux (E), Sociaux (S) et de Gouvernance (G). Cette mesure, prévue avant les élections européennes de juin 2024, vise à améliorer la transparence des informations financières liées à la durabilité.
Les Défis à suivre en 2024 : concrétiser le contenu des COP, financer la Transition, surmonter le Greenwashing judiciarisé
Un processus de COP qui impose aux spectateurs de devenir acteurs
Si le processus a permis d’aboutir aux Accords de Paris en 2015, il n’est plus efficace pour faire évoluer concrètement les différents dossiers. C’est désormais aux autorités publiques locales d’aménagement des territoires, aux entreprises et à la société civile de prendre le relais. Aucun gouvernement n’a produit au travers des processus de COP une action climatique à la hauteur des enjeux.
La transition énergétique : l’exemple des batteries électriques
Ksapa anime par exemple une initiative collaborative – Green Transition Free from Forced Labor. Elle rassemble différents grands investisseurs et entreprises siégeant aux Etats-Unis et dans l’UE. Cette initiative développe des outils concrets facilitant la transition et le développement de technologies « vertes » dans des schémas respectueux des droits humains. Dans ce domaine, la COP 28 a été marquée par une décision ambitieuse de réduire de 90% les émissions de véhicules neufs d’ici 2040. En pratique, les textes émanant de la COP 28 laissent les Etats et entreprises très libres de leurs engagements et champs d’actions. Ils ne sont concrètement engagés à rien. Pourtant, cette décision créé mécaniquement des pressions sur la production de métaux et minerais critiques nécessaires à la fabrication de batteries électrique. La finalisation des discussions sur le règlement des Matières Premières Critiques a confirmé une liste de 34 matières nécessitant un approvisionnement sécurisé, avec des objectifs exigeants de production, transformation et recyclage d’ici 2030 rien qu’au sein de l’UE. Ksapa a produit un guide calibré sur les standards de due diligence de l’OCDE pour organiser ses filières en engageant les différents acteurs pour garantir une transition respectueuse des droits humains. A suivre en 2024.
La transition énergétique : la question des financements
Les annonces de trillions fléchés vers les objectifs de décarbonation se succèdent de COP en COP. La création de nouveaux fonds s’empile aussi de COP en COP. Reste le plus dur : honorer les engagements. Cela soulèvent des inquiétudes quant à la mobilisation des financements nécessaires. Par exemple, bien que la Commission Européenne mise sur la facilitation d’accès aux financements existants du Plan de relance post-Covid, des questions subsistent quant à l’ampleur des investissements requis. Le nouvel instrument STEP (Strategic Technologies for Europe Platform), avec une proposition initiale de 10 milliards d’euros, est sur la table, mais son allocation dépend de la coopération des États membres, ce qui suscite des réticences. Quoiqu’il arrive, cet ordre de grandeur serait très insuffisant, selon les observateurs, pour répondre aux besoins de la transition, alors qu’au-delà des matières premières, ce sont toutes les technologies et énergies stratégiques ciblées dans le règlement Net Zero Industry (NZIA) qui nécessitent un gros coup d’accélérateur : éolien, solaire, pompes à chaleur, batteries, hydrogène, réseaux électriques, biogaz, carburants durables (issus de biomasse ou d’hydrogène). Comme si la question de ces financements stratégiques ne suffisait pas, la COP 28 a jugé utile d’ajouter à la liste exigeant une accélération rapide des financements des secteurs gourmands en capitaux, et ne faisant l’objet d’aucun consensus scientifique ni local ni international quant à leur capacité à apporter une réponse concrète à l’urgence climatique imposant une décarbonation rapide dans la décennie à venir : la capture de CO2 et le nucléaire. Les élections américaines prévues en novembre 2024 soulèvent enfin des inquiétudes quant à la stabilité des engagements finançant la décarbonation, portés dans le cadre du plan NRA pour les prochaines années.
La question de la mobilisation des financements ne se réduit pour autant pas aux trillions portés sur les fonds. Il convient aussi pour les entreprises et les investisseurs d’organiser les schémas techniques et financiers pertinents. A cet effet, Ksapa conçoit des programmes permettant d’organiser des schémas techniques de décarbonation, financés et réplicable au travers d’actifs. Cela permet déjà d’activer les dispositifs existant et aider les décideurs qui veulent déployer des engagements sans avoir les compétences techniques et la disponibilité d’organiser et déployer ces programmes.
Le Greenwashing entre dans une nouvelle ère de contentieux juridiques
Les contentieux climatiques portés au niveau des tribunaux sont recensées au travers de plus de 65 juridictions dans le monde. Elles ont encore augmenté de plus de 140% depuis 2020. A titre illustratif, le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) ont déposé deux plaintes emblématiques auprès de la Commission européenne courant 2023.
- L’une pointe le greenwashing et les pratiques commerciales jugées trompeuses de 17 compagnies aériennes
- Une autre, cible des allégations commerciales jugées trompeuses sur la recyclabilité des bouteilles d’eau de grandes marques
Ces incidents soulignent la nécessité de renforcer la surveillance et la conformité pour garantir une transition crédible. Là encore, la mise en conformité réglementaire portée par exemple par la CSRD et la CSDDD à venir impose une revue stratégique et opérationnelle des activités – une activité menée là encore au quotidien par les experts de Ksapa partout dans le monde. Le passeport digital progressivement déployé dans le secteur textile notamment promet d’être une autre source de contentieux selon la qualité de l’analyse et de la donnée que pourront fournir les entreprises.
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En savoir plus :
Farid Baddache sera des nôtres à la conférence annuelle Sustain, les 11 et 12 mars 2024. Il intervient à l'une des sessions consacrée à la CS3D : "CSDDD: What You Need to Know Today". Il est encore possible de s'inscrire gratuitement en distanciel ou en étant avec nous sur place à Paris. Découvrez l'ensemble du programme ici.
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