La journée du 15 mars marque un tournant dans l'engagement de l'Union européenne en faveur du développement durable et de la responsabilité sociétale des entreprises. Après une série de négociations et de compromis, les États membres de l'UE sont parvenus à un consensus sur un nouveau projet de texte sur le devoir de vigilance (CSDDD). Quelques jours après, le 19 mars, la Commission des affaires juridiques du Parlement a approuvé ce texte, un signal indiquant que la directive européenne sur le devoir de vigilance devrait être finalement bien adoptée en session plénière le 24 avril 2024.
Cet accord novateur est sur le point d'introduire un cadre obligeant les entreprises à intégrer des pratiques durables et des processus de diligence raisonnable à la fois dans leurs opérations et leur chaîne de valeur.
Heidi Hautala, vice-présidente du Parlement européen et présidente du groupe de travail sur la conduite responsable des entreprises, a commenté l'accord : "Le prix de l'accord a été une dilution significative du niveau d'ambition de la #CSDDD." Cependant, elle a souligné à quel point il s'agit d'une avancée cruciale : "Les bénéficiaires de la CS3D seront les millions de personnes victimes de l'esclavage moderne et d'autres victimes de négligence et d'abus de la part d’entreprises. Les entreprises responsables bénéficieront également de règles du jeu équitables et les entreprises s'engageront enfin davantage dans la lutte contre le changement climatique."
Le champ d'application est le suivant :
- La directive s'applique aux entreprises européennes et non européennes employant au moins 1000 personnes.
- Les entreprises de l'UE doivent réaliser un chiffre d'affaires net mondial d'au moins 450 millions d'euros
- Les entreprises non européennes doivent réaliser un chiffre d'affaires net d'au moins 450 millions d'euros dans l'Union.
- L'approche des secteurs à haut risque a été exclue. Tous les secteurs sont donc potentiellement concernés.
Délais de mise en œuvre :
- Les entreprises employant plus de 5 000 personnes et réalisant un chiffre d'affaires de 1,5 milliard d'euros disposent d'un délai de trois ans pour se mettre en conformité.
- Les entreprises employant plus de 3 000 personnes et réalisant un chiffre d'affaires de 900 millions d'euros disposent d'un délai de quatre ans.
- Les entreprises employant plus de 1 000 personnes et réalisant un chiffre d'affaires de 450 millions d'euros disposent d'un délai de cinq ans.
La directive européenne touchera désormais environ 5 400 entreprises de l'UE, ce qui réduit de près de 70 % le champ d'application initialement visé, représentant environ 0,05 % de toutes les entreprises de l'Union européenne.
Toutefois, elle aura un impact indirect sur de nombreuses autres entreprises tout au long des chaînes de valeur mondiales, car les grandes entreprises du champ d'application répercuteront les exigences sur leurs partenaires et leurs fournisseurs.
Malgré la réduction de son champ d'application et de son ambition, la directive devrait contribuer à "uniformiser les règles du jeu" pour les entreprises basées ou exerçant des activités dans l'UE, en créant un cadre harmonisé de diligence raisonnable. Elle obligera les entreprises du champ d'application à prendre des mesures tangibles pour réduire et, à terme, éliminer les impacts sociaux et environnementaux négatifs de leurs activités et de leur chaîne de valeur. Cela aura non seulement un impact positif sur les personnes et la planète, mais permettra également aux entreprises de mieux atténuer les risques inhérents à une chaîne de valeur mondialisée, tels que les ruptures d'approvisionnement, la volatilité des coûts et les incidents liés à la réputation. À long terme, ce cadre d'atténuation des risques et de diligence raisonnable peut être enrichi pour aider les entreprises à se préparer à la réduction des émissions carbone et à conduire la transition vers des modèles d'entreprise plus durables.
La directive sur le devoir de vigilance sera soumise au vote lors de la session du 24 avril 2024.
La CS3D est l’un de vos sujets ? Découvrez l’article écrit par l’un des intervenants à la session CS3D à Sustain 2024, ou encore la vision d'un représentant du Pacte Mondial qui était des nôtres.
« Les entreprises sont confrontées à une mosaïque d’injonctions convergentes en matière d’appréhension et de meilleure gestion de leurs impacts sur les droits humains le long de leurs opérations et chaînes de valeur. La CS3D est un outil de simplification à 3 niveaux. Tout d’abord, elle clarifie au-delà d’initiatives réglementaires les attendus pour chaque entreprise. Également, en tant qu’outil à vocation réglementaire, la CS3D permet dans la durée de s’assurer que les entreprises contribuent chacune à leur niveau au lieu de faire porter la charge sur les plus motivées. Enfin, elle est cohérente avec les travaux déployés dans le cadre de matérialité d’impact de la CSRD afin de réduire les duplications d’efforts »
Farid Baddache, Ceo Ksapa
« La CSDDD est un outil au service d'une démarche de transformation des modèles d’affaires et des chaines de valeurs. Elle s'inscrit ainsi dans le prolongement du concept de RSE, en permettant aux entreprises d’anticiper les défis sociaux et environnementaux et de respecter les socles fondamentaux au sein d’une économie mondialisée, mais aussi de renforcer le dialogue avec l’ensemble des parties prenantes. »
Nils Pedersen | Délégué général du Pacte mondial de l’ONU - Réseau France
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